Quand Stephen King dit certaines choses...

Publié le par Leussain

Quand Stephen King dit certaines choses...

Une célèbre réplique d'un film d'Audiard faisait quelque chose comme ça : "Quand les types de 130 kilos disent certaines choses, les types de 60 kilos les écoutent." Et bien quand un type qui a vendu plusieurs dizaines de millions d'exemplaires de ses bouquins, qui a été traduit dans toutes les langues, du Cantonais à l'Angolais en passant par l'Inuit (j'en sais foutrement rien, en fait), un type dont on a tiré des bouquins deux ou trois chefs d'oeuvre cinématographiques, quand un type comme lui dit certaines choses... et bien les scribouillards, les forçats du verbe, les peine à écrire, les aspirants écrivains, bref les types comme moi écoutent, ils se pendent au bout de son stylo.

Bon, certes, des écrivains largement moins bon que lui obtiennent le même succès populaire (avant d'être rapidement oubliés, ça c'est de la putain de justice divine), il n'y a qu'à jeter un oeil dans le top dix des ventes, où Marc Lévy fait régulièrement des incursions. J'aurai l'occasion de revenir dans un article ultérieur sur tout le bien que je pense de Mr Stephen King, injustement dénigré par les critiques à une certaine époque, et dont on ne s'apercevra que trop tard (pour lui) que c'est un grand écrivain, dans sa partie, une des plumes les plus importantes de sa génération.

Voilà c'est lâché. J'assume.

Après une première partie autobiographique, où King tente de faire comprendre comment s'est formé l'écrivain, il entre dans le vif du sujet en livrant sa méthode de travail, des secrets de fabrication, tous les tuyaux qui peuvent, s'ils sont appliqués, faire d'un tâcheron un écrivain convenabl, à défaut d'un génie littéraire. Certains relèvent tellement du bon sens qu'ils sont appliqués par tous les bons auteurs. D'autres, plus spécifiques, ne te serviront que si tu comptes devenir Stephen King lui-même, car King livre SA recette, celle qui a fait son succès, et nombre d'auteurs talentueux ne piochent pas dans ses ingrédients, et possèdent si bien leur langue natale qu'ils la prennent et la retournent dans tous les sens sans se soucier de règles. Tous ses conseils sont néanmoins judicieux. Tout ça est tellement pertinent que je les ai noté en deuxième de couverture, pour t'en faire profiter. T'as vu comme je suis sympatoche ? En voici l'essentiel :

-- Eviter la surabondance d'adverbes. Selon lui, il faut leur faire la chasse. C'est pas faux. Mea Culpa.

-- Eviter les métaphores douteuses et les comparaisons clichés. Toujours chercher original.

--Toujours avancer dans l'histoire. (dans le cas d'une fiction)

-- Partir sur la base d'un concept peut mettre sur la bonne piste. "Et si blablabla...". La thématique et l'intrigue viennent ensuite naturellement.

-- Les dialogues doivent paraître authentiques et révéler la personnalité du personnage. Il ne faut pas faire parler un paysan comme un énarque, ou un énarque comme un philosophe, mais rien n'empêche qu'un paysan soit philosophe.

-- Vérifier si les pronoms identifient facilement leurs noms.

-- Ecremer le texte pour en faciliter la lecture. Pour King, la version 2 de ton texte doit être égale à la version 1 - 10%. Bon, pour moi, la version 2 est plutôt égale à la version 1 + 20%...

-- Pas d'esbroufe, c'est pas les chiffres et les lettres ! Il ne s'agit pas d'impressionner le lecteur mais de le divertir.

-- Les premiers mots qui viennent à l'esprit sont souvent les meilleurs. Ne recourir à un dictionnaire des synonymes qu'en cas de sévère carence de vocabulaire.

-- Eviter les redondances. Evite de répéter la même chose deux fois, bordel !

-- Lire et écrire beaucoup. Le gus qui veut faire plombier ou médecin doit se fader des années d'école ou de formation pour apprendre son métier. L'écrivain, lui, pour devenir compétent, doit seulement s'exercer et digérer tous les bouquins qui lui tombent sous la main. Les bons comme les sombres merdes. On apprend de Céline et Camus, et on apprend ce qu'in ne faut pas faire de Musso et Lévy. C'est magique !

-- Tuez vos chéries ! TUEZ VOS CHÉRIES ! Parfois, on peut être très content d'un passage, d'une tournure de phrase, mais elle n'a pas sa place dans l'histoire. On l'aime, on en est fier, mais pourtant il faut être sans pitié, il faut la supprimer. TUEZ VOS CHÉRIES !

En étant jamais didactique et assommant, en truffant son discours d'anecdotes savoureuses sur lui-même et d'autres écrivains célèbres, King réussit l'exploit d'instruire en divertissant. Oui, tu l'as dit, comme Dora l'exploratrice, je te l'accorde.

On peut noter que l'écriture d'"Ecriture" a été interrompue un bon moment, en partie à cause du terrible accident qui a failli lui coûter la vie (pile le genre d'expression merdique que le maître te déconseillerait d'utiliser dans ton roman) et que c'est en quelque sorte l'écriture qui lui a permis de surmonter cette sale période de sa vie.

Bon, maintenant c'est sûr, il faut vraiment que je me prenne une carte de blibliothèque, biscotte je suis loin d'atteindre les quatre-vingts livres par an que s'enfile le gazier Steve (il dit qu'il lit lentement, ce con !). Et le plus important de ses commandements, n'est-il pas : "LIRE BEAUCOUP" ?

Publié dans autour de l'écriture

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F
Je vais vite à la selle et je lis tout ça. Sauf si mon caca me pique trop les yeux.
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