Tu sais que t'as un physique à écrire des livres ?
Je ne sais pas si tu as remarqué, mais de plus en plus souvent, quand l'auteur d'un bouquin n'est pas trop vilain(e), on nous colle sa jolie tronche sur le bandeau, dans une pose esthétisante magnifiée par un noir et blanc des plus classieux, quand ce n'est pas carrément sur la couverture. Ce phénomène est aussi valable pour les hommes que pour les femmes, note bien.
Je ne sais pas... les éditeurs doivent se dire qu'un bouquin se vendra mieux si le public sait qu'il n'a pas été écrit par un obscur quasimodo. Prends Amélie Nothomb ou Eliette Abécassis, par exemple ; tu les imaginerais actrices de porno-gonzo plutôt que femmes de lettres, pas vrai ? Et Olivier Adam avec son regard ténébreux et sa barbe de trois jours qui lui donne cet air baroudeur propre à séduire la ménagère ? Et Florian Zeller et sa mèche rebelle, c'en est pas un éphèbe ? Je te gage que les lectrices de ces deux-là, elles tournent les pages de leurs bouquins en s'humectant le doigt dans la chatte ! De si beaux mecs doivent écrire de bien belles choses.
Mais alors ?... comment je vais faire moi pour fourguer de la rame au kilomètre si un jour d'aventure, je suis publié ? Enfin quoi ?... Ce qu'il y a de plus beau chez moi c'est ma verge. Sans char, j'aurai pu embrasser une carrière de mannequin de bite chez Durex si je m'étais pas orienté vers le métier d'esclave en usine. Y a pas si longtemps encore, l'archidiocèse de Paris me contactait pour une commande spéciale ; ils souhaitaient faire des moulages zobesques pour fabriquer des cierges originaux, afin d'en équiper Notre Dame de Paname et drainer du touriste japonais, avide de curiosités et pas radin sur les offrandes. Je doute que Flammarion, Gallimard ou Hachette accepte de coller mon engin en couverture. Les journaleux de Télérama en feraient une descente d'organe. De toute façon au format poche ça ne tiendrait plus !...
Maléfiction ! Je suis donc condamné à essayer d'écrire correctement, à bosser ma concordance des temps et ma syntaxe, à me sortir les tripes pour y puiser des métaphores chiadées, à nouer des intrigues qui ne sont pas usées jusqu'à la trame, à tenter de faire jouir cette putain de langue française devenue frigide depuis que Guillaume Musso et Marc Lévy lui sont montés dessus !
Et encore même comme ça c'est pas gagné.
C'est tout. Au revoir.