On n'est jamais trop pédé.

Publié le par Leussain

On n'est jamais trop pédé.

Telle aurait pu être la devise de Cyril Collard (à ne pas confondre avec un célèbre avocaillon reconverti dans la politique et un peu faf sur les bords), écrivain et cinéaste de talent emporté dans la fleur de l'âge par une microscopique boule hérissée de pointes affectueusement baptisée VIH. Putain de camion, c'est vrai, mais putain de SIDA aussi, qui nous a également ravi Freddie Mercury, Isaac Asimov et quelques autres artistes, qui comme Collard sont partis trop tôt.

Je n'ai jamais vu le film adapté de "Les nuits fauves", c'est pourquoi j'abordai le livre de Cyril Collard avec l'innocence d'un enfant de choeur (avant sa première sodomie), ou presque. La première surprise, c'est que je tenais là un monument de la littérature Trash. Pas une page ne se tourne sans que le ramoneur ne se fasse ramoner vigoureusement le rectum ou qu'il ne ramone celui de ses camarades. Car le héros, qui est vraisemblablement l'écrivain, vogue à voile et à vapeur. Entre deux éphèbes, il ne dédaigne pas se mettre une fille au bout de la queue. Et la rencontre avec la jeune Laura, dix-sept ans, va l’entraîner dans une spiraaaaaaaaaaaale de violence (expression pompée dans un magazine féminin). Entre eux, c'est l'amour vache qui tâche. Leur relation est pimentée par le fait que monsieur est séropositif, ce qui tu ne l'ignores pas, posait de gros problèmes dans les années quatre-vingt quant à l'espérance de vie... On n'avait pas encore inventé la trithérapie et baiser sans capote, c'était comme jouer un match de tennis en prenant la glissière centrale de sécurité de l'autoroute comme filet. Sortir en boîte sans capote dans son portefeuille, c'était aussi inconscient que prendre sa voiture sans boucler sa ceinture. Si tu aimes mes analogies et mes comparaisons et mes métaphores, tu peux me retrouver au marché de Rouillac tous les 27 du mois, où je les fourgue à la douzaine et démoulés de la veille.

J'en étais où ? Ah ! Oui. Donc, le style est tranchant, brut de décoffrage avec des traits de poésie urbaine. C'est noir de chez NOIR et on plonge au plus profond de la matière humaine. Il se gratte l'âme jusqu'au sang, Collard, et c'est bon de le lire. C'est tout ce qu'un type comme Philippe Delerm ne fera jamais , pas parce qu'il n'a pas de talent mais parce qu'apparemment le plus gros dilemme moral qu'il ait eu à surmonter fut de choisir entre la poire et le fromage...

Tu peux mettre "Les nuits Fauves" tout en haut de ta liste de livres à lire, avec le mien oeuf corse si ce n'est déjà fait. Et si tu es un mâle hétéro et que tu chopes une trique à casser des pierres en lisant certains passages, c'est que vraiment mon pote tu t'es grave fourvoyé en t'orientant sexuellement.

Mais il n'est jamais trop tard.

Au revoir.

Publié dans critique livre

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
N
c'est du lourd, du très lourd ce livre et sa vie....<br /> contente qu'un de mes livres te plaise (enfin !)
Répondre